Tibet, le pays des neiges
Le Tibet est la région la plus haute du monde avec une moyenne de 4900m d’altitude. C’est une terre de hauts plateaux...
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Certains destins nous font rêver et nous inspirent, des hommes et des femmes d’exception qui réveillent en nous une soif de découverte et un immense respect pour la liberté. Pour tous les aventuriers modernes, Alexandra David-Néel représente cette héroïne : la plus grande exploratrice du XXe siècle. D’une érudition rare, cette orientaliste de terrain a su transmettre les clés du bouddhisme tibétain aux sociétés occidentales. Le chemin vers la sagesse n’était pas un long fleuve tranquille, elle n’a jamais renoncé pour poursuivre son éveil.
1. Sa devise : Marche comme ton cœur te mène et selon le regard de tes yeux
Ce verset de la Bible comme adage lui a certainement permis de s’émanciper d’un milieu familial dénué de douceur et d’affection. Eugénie, future Alexandra, est née en 1868 d’un père français et d’une mère belge aux origines scandinaves et sibériennes. A 15 ans, elle fugue en Angleterre. Suite à ce premier épisode sans succès, elle tente de nouveau de s’échapper deux ans plus tard. A l’âge de 17 ans, elle s’enfuie vers la Suisse et l’Italie, en franchissant à pied le col du Saint-Gothard. La voilà déjà prédestinée aux longues marches à venir. Elle effectue en 1890, son premier grand voyage en Inde, en passant par Ceylan.
2. Curieuse, féministe, anarchiste mais aussi chanteuse lyrique
C’est en étudiant à Londres qu’elle commence à s’intéresser aux philosophies orientales. En quête de vérité, sans se soucier de ses propres contradictions, elle s’intéresse à tout. Proche du géographe Elisée Reclus, ses convictions anarchistes et féministes prennent forme, elle écrit un essai si contestataire que personne ne veut le publier. A Paris elle visite le musée Guimet qui fait naître sa vocation d’orientaliste. Elle apprend le sanskrit et obtient également son premier prix de chant lyrique. Elle commence une carrière de cantatrice pendant plusieurs années en chantant à Hanoï ou Saigon.
3. Directrice artistique du Casino de Tunis
Etonnant parcours qui la mène à Tunis où elle rencontre son futur époux : Philippe Néel. Ils se marient en 1904, après l’approbation du père d’Alexandra.
Lettre de Louis David à Philippe Néel :
Monsieur Néel, Votre lettre m’a causé un profond étonnement. Jusqu’à ce jour, ma fille avait manifesté sa ferme volonté de ne jamais aliéner sa liberté et elle protestait à chaque instant contre l’état d’infériorité que la loi impose à la femme dans tous les actes de sa vie après son mariage. Aujourd’hui votre demande me ferait croire qu’elle a fortement modifié ses idées. S’il en est ainsi, monsieur, je ne vois pas de raison pour vous refuser mon consentement…
4. Elle poursuit le chemin de l’éveil à 43 ans
En 1911, elle ne peut se résigner à sa vie de femme mariée et annonce à son mari son départ en Inde pour continuer ses recherches pendant 18 mois. Elle ne reviendra que 14 ans plus tard. Ils entretiendront une correspondance jusqu’à la mort de son mari en 1941, avec plus de 3000 lettres échangées.
5. Rencontre avec le 13e Dalai Lama à Kalimpong
Durant ses années de recherche et de retraite au Sikkim, elle rencontre Aphur Yongden, son jeune serviteur qui deviendra son fils adoptif. Elle obtient également une audience avec le 13e Dalai Lama à Kalimpong. Elle continue son rude travail solitaire pendant plus de deux ans à 4000m d’altitude.
6. Au Japon, un moine philosophe lui donne l’idée de se déguiser en mendiante pour entrer dans Lhassa
Contrainte de quitter le Sikkim, sa détermination s’intensifie et la marche vers le Tibet interdit débute. Après un passage par le Japon et la Corée, c’est depuis la Chine que commence le périple jusqu’à Lhassa. L’aventure est épique et difficile. L’équipée mange le cuir de ses bottes pour assouvir sa faim. En 1924, elle a alors 56 ans lorsqu’elle entre dans Lhassa proclamant : Lha Gyalo (les dieux ont triomphé). Aujourd’hui les trekkeurs chantent ces mots lorsqu’ils passent un col au Ladakh ou au Tibet.
7. L’amoureuse éternelle du Tibet
De nos jours, le Tibet n’est plus celui d’Alexandra. Mais qu’il soit colonisé, asservi, ou représenté comme une province chinoise sur les cartes : le Tibet demeure un rêve. Il n’a pas fini de hanter les consciences, ce Toit du Monde, ce pays des neiges.
Extrait de Voyage d’une Parisienne à Lhassa (1927, disponible en Pocket) :
« Pendant des jours, nous marchions dans la demi-obscurité d’épaisses forêts vierges, puis, soudain, une éclaircie nous dévoilait des paysages tels qu’on n’en voit qu’en rêve. Pics aigus pointant haut dans le ciel, torrents glacés, cascades géantes dont les eaux congelées accrochaient des draperies scintillantes aux arêtes des rochers, tout un monde fantastique, d’une blancheur aveuglante, surgissait au-dessus de la ligne sombre tracée par les sapins géants. Nous regardions cet extraordinaire spectacle, muets, extasiés, prêts à croire que nous avions atteints les limites du monde des humains et nous trouvions au seuil de celui des génies. »
8. En 1937, elle voyage à bord du Transsibérien
De retour en France en 1925, elle s’installe pendant une dizaine d’années à Digne, dans les Alpes de Haute Provence. Elle travaille sans cesse, donne des conférences, écrit le récit de son aventure et partage autant que possible son expérience de terrain. Nomade dans l’âme, elle repart en Chine en empruntant le Transsibérien. La seconde guerre mondiale débute, elle restera en Chine avec Yongden pendant 9 ans.
« Je crois que cela m’a toujours été et me serait, plus que jamais, pénible de demeurer quelque part. Drôle et inconcevable idée qu’ont les gens de s’attacher à un endroit comme des huitres à leurs bancs, quand il y a tant à voir de par le vaste monde et tant d’horizons à savourer. »
9. A 82 ans, elle campe en plein hiver au lac d’Allos à 2240 m
En 1946, elle rentre à Digne, son « Himalaya pour lilliputiens », et continue à écrire du matin au soir, malgré son âge avancé, elle travaille 16h par jour. Quelques visiteurs viennent lui demander des conseils, ses réponses sont toujours empreintes d’autorité et de sagesse. Yongden meurt en 1955 et Alexandra se retrouve seule.
10. Elle renouvelle son passeport à l’âge de 100 ans
Elle fut accompagnée à la fin de ses jours par Marie-Madeleine Peyronnet qui s’occupait d’elle et de la maison pendant une dizaine d’années. Avec le projet d’effectuer un tour du monde en 4cv avec sa secrétaire loquace, elle met à jour ses papiers d’identité. Alexandra David-Néel décède en septembre 1969, à presque 101 ans. Ses cendres et celles de Yongden valsent désormais dans le Gange.
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Aujourd’hui encore, cette grande figure du XXe siècle continue de fasciner. Une jeune exploratrice française, Priscilla Telmon, est partie sur les traces d’Alexandra David-Néel. Voici la bande d’annonce du documentaire sur ses 6 mois jusqu’à Lhassa :
Nous vous conseillons pour partir à l’aventure sans quitter votre chambre :
– Mystiques et magiciens du Tibet, 1929, Ed. Payot
– Au coeur des Himalayas : Sur les chemins de Katmandou, 1949, Ed. Pocket
*– Journal de voyage; Lettres à son Mari,*1975, Ed. Marie-Madeleine Peyronnet
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